Yann-Léon et Marc BEYER Domaine Léon BEYER - Eguisheim - France
Dans le verre de Jean-Yves SCHILLINGER – voir le reportage
Aimés des chefs étoilés depuis les années soixante, les BEYER d’Eguisheim, ont œuvré pour faire connaître et apprécier les grands Alsace à travers le monde entier de la gastronomie.
Nous avons rencontré Yann-Léon et son père Marc BEYER au Domaine Léon BEYER, domicilié dans un ancien relais de poste du XVIIème siècle acquis par le grand-père Léon-Xavier pour y déployer l’entreprise en dehors du centre du village d’Eguisheim. Depuis 1580, la maison Léon BEYER exerce ses talents en Alsace… souvent dirigée par un Léon, en hommage au Pape Léon IX (Bruno d’Eguisheim-Dagsbourg – né le 21 juin 1002 – mort à Rome le 19 avril 1054 – élu pape le 1er février 1049 sous le nom de Léon IX – canonisé en 1087). Marc BEYER est une exception à cette règle, ce qui ne l’a nullement empêché de se faire un prénom célèbre aux côtés de son père et dans la poursuite de l’œuvre de la famille. Depuis 15 ans, Yann-Léon seconde son père et assure l’héritage d’une maison plusieurs fois centenaire.
Un vigneron qui aime la gastronomie
Marc BEYER : “L’amour des chefs de cuisine, de leur table est né avec mon père, un amoureux de la gastronomie qui n’hésitait pas à parcourir des centaines de kilomètres pour un déjeuner ou un dîner mémorable. Par amitié souvent, par raison professionnelle quelque fois, ils sont devenus nos ambassadeurs.
Après-guerre, l’hôtel RITZ de Boston a été le premier client à commander une bouteille de Léon BEYER outre Atlantique ! Plus qu’un signe, c’est devenu une motivation forte pour mon père de s’engager aux côtés des restaurateurs en un temps où le star système de la cuisine n’existait pas.
Fidèle à l’engagement familial dans la promotion de la région et d’Eguisheim en particulier (mon grand-père et mon père ont été maires d’Eguisheim de 1945 à 1996), mon père Léon-Joseph a su convaincre les dirigeants de la cave coopérative WOLFSBERGER principalement, ainsi que quelques viticulteurs, de le soutenir et de partager l’effort financier pour disposer d’un lieu mémorable et y héberger un restaurant gastronomique digne des vins d’Alsace et de sa gastronomie: Le Caveau d’Eguisheim était né. Etoilé au Guide Michelin, le Caveau a vu à ses fourneaux des chefs de cuisine renommés, dont Olivier NASTI, Jean Christophe PERRIN en dernier lieu…
En 1951, Léon-Joseph BEYER a été l’un des fondateurs du Club Prosper Montagné, (www.club-prosper-montagne.fr) en hommage au chef de cuisine français, auteur entre auteur du Larousse Gastronomique. Le prix Prosper Montagné, qui a lieu chaque année, est le plus vieux concours de Cuisine en France, Virginie BASSELOT, M.O.F., Chef des cuisines de l’Hôtel-Restaurant Saint-James à Paris sera la Présidente du jury de l’édition 2017, après Marc HAEBERLIN en 2015.
Mon père et moi-même avons accueilli, guidé les premiers pas de journalistes/écrivains devenus de célèbres ambassadeurs de l’Alsace comme Pierre BONTE, Jacques-Louis DELPAL et Gilles PUDLOWSKI et nous les avons “vaccinés Alsace”.
D’Eguisheim vers les plus belles tables du monde…
Tout jeune, mon père m’a embarqué dans ses tournées gastronomiques et m’a transmis cette passion pour les bonnes tables et l’engagement envers ces artistes du goût qui subliment le travail que nous effectuons dans nos vignes et dans nos chais.
De l’âge de 9 ans jusqu’à mes 17 ans, j’étais en pensionnat chez les Pères Jésuites à Metz, une période difficile car on ne rentrait à la maison qu’une fois par trimestre mais qui m’a laissé de bons souvenirs et une rigueur dans mon travail quotidien. C’est l’époque où je visitais à Metz, avec mon oncle Henri BEYER, qui fut son chef de cabinet, Robert SCHUMAN que j’ai ainsi eu l’occasion de côtoyer dans un contexte familial. Une image qui m’est restée et qui a fait de moi un Européen convaincu depuis toujours. Après un premier Baccalauréat à Metz, un deuxième à Colmar, une école de Commerce à Grenoble, une formation en œnologie à Geisenheim près de Wiesbaden (Allemagne), j’ai terminé mon cursus scolaire par une année à Londres pour parfaire mes connaissances linguistiques.
A mon arrivée dans l’entreprise en 1970, nous exportions dans les pays limitrophes : Allemagne, Suisse, Luxembourg, Belgique, Pays-Bas… Aujourd’hui notre maison est présente dans 70 pays représentant plus de 80% de notre production!
Nos vins figurent sur les cartes de nombre des plus grands restaurants et des plus belles tables du monde.
Depuis toujours, nous nous sommes investis, côte à côte, pour favoriser l’éclosion des initiatives valorisant le patrimoine gastronomique et vinique de l’Alsace et de la France pour contribuer à leur rayonnement mondial. J’ai moi-même poursuivi cet effort avec FESTIGA, créé en 1990 à Colmar, qui, lors de ses trois éditions, s’étendait sur 15 000 m² et avait réuni les plus grands chefs mondiaux. Ils étaient venus amicalement faire la démonstration de leur savoir-faire en mettant en valeur les produits et les vins de nos terroirs. Paul BOCUSE, lui-même, nous avait honorés de sa participation, sous la condition d’avoir comme assistant… Marc HAEBERLIN, qui s’était plié de bonne grâce à cette mission. Un pur bonheur pour tous les participants.
Le rayonnement de cet évènement fût mondial et les dignes héritiers en sont aujourd’hui : PLAZA CULINARIA www.plaza-culinaria.de à Freiburg (Allemagne) et EGAST www.egast.fr à Strasbourg (France).
L’Alsace rejoint la statue de la liberté à New York en 1986
En 1986, pour commémorer le centenaire de l’inauguration de la statue de la liberté à New York, avec le parrainage de la Ville de Colmar, nous avons pu réunir 22 chefs étoilés alsaciens pour “envahir” les États-Unis avec notre cuisine et nos vins… Nos chefs sont allés bénévolement travailler “en résidence”, chacun pendant une bonne semaine, y démontrant la richesse de la gastronomie alsacienne dans les plus célèbres établissements new-yorkais. Tomi UNGERER nous fit, à l’époque, l’honneur d’une belle affiche symbolisant notre démarche. Les répercussions dans la presse américaine (New York Times – voir l’article : http://www.nytimes.com/1986 , Daily News,..) nous ont valus de faire connaitre et reconnaitre les vins d’Alsace outre Atlantique avec panache et élégance.
Des vins élaborés pour la gastronomie
“Toute cette passion pour la haute gastronomie se retrouve forcément dans notre travail de la vigne et notre vinification qui favorise l’obtention traditionnelle de vins secs et vifs, partenaires irremplaçables de la cuisine d’exception tout autant que de la cuisine traditionnelle. Nous sommes respectueux de la culture gastronomique qui ne fait de la douceur qu’un allié d’exception.
De nos jours, les vins sont souvent “travaillés” pour les concours, ce qui fausse la réelle finalité du vin : se boire, enrichir, rafraichir, souligner les saveurs des mets. Lors d’un concours, vous allez goûter plus de 50 voire 100 vins différents, ce sont forcément les plus flatteurs au palais, chargés en sucre, fardés, qui vont dominer et détruire l’élégance plus puritaine des vrais grands vins. Ainsi, nombreux sont les vins alsaciens, historiquement secs, devenus de plus en plus sucrés et dopés pour les concours, à la recherche de médailles. La triste conséquence est qu’ils disparaissent de la carte des restaurants, remplacés de façon inconcevable il y a peu, par des vins allemands et autrichiens, devenus eux-mêmes entre-temps de plus en plus secs.
Recherchant une fermentation complète, les vins de notre maison sont secs , proposant fruit et fraîcheur.
La fermentation, par l’action des levures mange le sucre contenu dans le jus des raisins pour le transformer en alcool. Nombreux sont les viticulteurs qui freinent cette fermentation pour conserver un sucre résiduel dans leurs vins et obtenir ainsi ce que j’appellerais “des vins de concours”. Le sucre résiduel apporte, de fait, une rondeur, un ersatz de richesse qui se transforme en lourdeur indigeste lors de toute consommation gastronomique, masquant les nuances subtiles, l’expression et l’élégance d’un plat.”
Transmettre l’amour de la vigne et de la table
Secondé par mon fils Yann-Léon depuis 15 ans, j’ai actuellement un peu plus de latitude pour continuer à valoriser et à promouvoir notre patrimoine viticole et gastronomique, au travers d’associations, comme le Club Prosper Montagné, l’Association Amicale Saveurs de France, et, depuis peu, et de façon plus confidentielle, l’Académie des Gastronomes. Elle fut fondée, en 1928, par Curnonski (le Prince des Gastronomes, de son vrai nom Maurice Edouard SAILLAND), réalisant le vœu de Brillat-Savarin : une Académie établie sur les bases immuables du plaisir et de la nécessité. Gourmands éclairés, convives aimables en seront membres…
Nous avons terminé notre entretien autour d’un Riesling Les Écailles 2007… sec et vif comme Marc BEYER à l’évocation de ses souvenirs d’ambassadeur gastronome d’Alsace…
Yann-Léon et Marc BEYER nous ont parlé de leur univers AJI
NOS TABLES
Toutes les belles et grandes tables honorées par le Club Prosper Montagné ainsi que beaucoup d’autres mais aussi nombres d’auberges plus simples, chaleureuses, proposant des produits exprimant leur nature vraie, ce qu’on appelle aujourd’hui des produits de terroir.
Le vrai plaisir c’est de changer de plaisir chaque jour !
DANS NOTRE ASSIETTE
De vrais artisans régionaux !
Fromagers comme: ANTONY à Vieux-Ferrette, Fromagerie SAINT NICOLAS – J. QUESNOT à Colmar, Au Vieux Gourmet – Cyrille LORHO à Strasbourg.
Les munsters HAXAIRE, SCHUSTER, DODIN..
SIEBERT, volailler à Egersheim.
Les boulangeries près de chez nous : Au Pain de mon Grand-Père à Colmar, Côté Four à Colmar, Hertzog à Muntzenheim…
DANS NOTRE VERRE
Tous les bons vins sans critère de couleur ni d’origine !
NOS SORTIES DE TABLES
En ville, des expositions ponctuelles de peinture ou autres, mais aussi, à la campagne, une bonne balade digestive.